Intervention sur la place du cloître Saint Merri

Etude

Avec Veit Streittmann plasticien

Notre participation à EMBELLIR PARIS résulte d’une motivation à la fois citoyenne, architecturale et artistique. Habitants du 2eme et 4eme arrondissement nous vivons au jour le jour la petite placette anonyme située au coin de la rue du cloître Saint Merri et de la rue Saint Martin. Depuis longtemps, cette placette nous semblait appeler une requalification et une restructuration. Son inscription dans la liste des endroits concernés par EMBELLIR PARIS nous donne l’occasion d’en faire une proposition.

La petite placette est aujourd’hui bien triste. Issue de la démolition de deux immeubles visibles sur le plan Turgot, elle est aujourd’hui très encombrée par un mobilier hétéroclite. Dans l’ombre des immeubles proches, elle apparaît comme un espace abandonné, évidé de sens. Les deux bancs placés parallèlement à la rue Saint Martin et la rue du cloître Saint Merri, au lieu d’inviter à séjourner sur la placette l’enferment sur elle-même et l’isolent de son environnement. Le bac à plantes situé le long du mur délimitant la placette côté Est, n’a pratiquement jamais de soleil, il n’y pousse donc pratiquement rien. Pour le moment, la placette fait figure d’un appendice ou d’un trou de l’espace urbain, d’un dépotoir qui permet d’abandonner des objets sans interférer avec la circulation des deux rues et qui sert aussi, à garer une dizaine de vélos.

Etat actuel de la place du Cloître Saint Merri
( photo VPL) état actuel

De plus, tout regard porté sur la placette est absorbé par le trou de l’espace urbain qu’elle forme, il y reste « coincé ». Aussi, il reste collé sur les deux hauts murs qui la délimitent. Il est du fait de cette absorption, impossible pour le regardeur de faire un lien entre la placette et son environnement alors que l’espace est isolé et exclu de la vie qui l’entoure. Ainsi il est impossible de même imaginer de séjourner sur la placette et de contempler, à partir d’elle, son environnement – pourtant riche sur un plan historique et architectural : la très vieille ville et l’église saint Merri – mais aussi l’animation des rues avoisinantes. La structure de la placette ne permet pas non plus de simplement regarder le bel et grand arbre qui y a poussé en hauteur pour trouver la lumière ou de trouver un moment de repos.

Tout cela est d’autant plus dommageable qu’elle se trouve sur l’axe historique nord/sud de Paris, le cardo maximus romain, et forme, avec l’église Saint Merri, une des portes symboliques du quartier Beaubourg/Les Halles/quartier de l’Horloge et de l’espace Halles /Marais en général. Dans ce sens la placette joue aussi un rôle important comme lieu de reconnaissance des habitants du quartier et comme souvenir emporté du cœur de Paris.

Nous voulons retourner le regard qui est aujourd’hui introverti, pour le tourner vers la ville, pour pouvoir donner aux futurs usagers de la place le plaisir de regarder les passants, d’admirer l’architecture de la façade de l’église ou encore de se rencontrer et de faire « salon ».

Nous proposons de retirer l’ensemble du mobilier présent sur la place, les deux bancs, la poubelle, les dix arceaux et le bac à plantes pour le remplacer par un dispositif en angle d’une double assise en béton mis en couleurs vives qui dégage le vide de la place, met en valeur l’arbre, et qui rend possible de très nombreux usages :
• Se rencontrer
• S’arrêter
• Regarder la ville et les passants
• Faire une petite représentation musicale, théâtrale
• Constituer une sorte de salon à ciel ouvert, une version intime et plus discrète de la piazza Beaubourg et de la place Igor Stravinsky.
• Un lieu à l’échelle du quartier, pour ses habitants mais aussi pour les touristes et les gens de passage.

Nous avons voulu travailler l’aménagement de cette place en relation avec les deux grandes places publiques emblématiques du quartier. Elle serait pensée comme un contrepoint plus intime, mais le choix du matériau comme celui des couleurs renvoient à la modernité et à la gaité de ces deux espaces.

Nous avons choisi de réaliser des assises colorées pour rendre cette intervention extraordinaire, attirante pour souligner son caractère joyeux et ludique

Nous avons minimisé les risques en réalisant des angles arrondis pour les assises, solidement construites en béton elles sont conçues pour résister au poids et au mouvement des personnes. La hauteur de 1 m pour les plus hautes permet à tous de pouvoir y accéder, comme une petite agora ou encore une estrade pour s’y installer seul ou à plusieurs.

La place est rendue accessible aux PMR qui peuvent faire face aux personnes assises, traverser sans encombre en diagonale et stationner où bon leur semble.

Par ailleurs, et ce n’est pas la même échelle temporelle, nous voudrions que la ville et la DRAC autorise les habitants des deux immeubles mitoyens à ouvrir, s’ils le désirent quelques fenêtres dans les pignons. Ces fenêtres qui seraient ouvertes à partir du deuxième étage permettraient d’instituer une relation plus riche entre le bâti et la place, et rendrait aussi les appartements un peu plus clairs dans les étages inférieurs.
Nous avons d’ailleurs trouvé dans le quartier au moins une ouverture de ce type et l’effet d’accroche sur la ville raconte de manière plus intéressante son histoire que celui donné par une fausse façade peinte.

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